« La nature nous a donné une seule langue et deux oreilles »
Dans l’un de ses écrits, Épictète a déclaré : «La nature nous a donné une seule langue mais deux oreilles, afin que nous écoutions deux fois plus que nous ne parlons». Force est de constater que la plupart des gens parlent beaucoup plus qu’ils n’écoutent. Pourquoi en est-il ainsi ? Parce que tout être humain, sous l’impulsion de son ego, c’est-à-dire de son «moi je», a tendance à vouloir monopoliser la parole lors d’un échange avec d’autres personnes. Souvent, cette tendance atteint son paroxysme lorsqu’il est en désaccord avec son interlocuteur, car il éprouve alors le besoin de le contredire et de lui prouver qu’il a tort, parfois avec véhémence.
Savoir écouter l’autre
Très rares sont les personnes qui savent écouter l’autre et lui laissent le temps de s’exprimer pleinement. Elles s’empressent généralement de l’interrompre et de reprendre la conversation à travers ce qui s’apparente à un monologue. Dans ces conditions, l’échange est difficile, voire impossible, car chacun s’emploie plus ou moins consciemment à faire valoir son point de vue, parfois sans même essayer de comprendre celui de l’autre. Dans les cas extrêmes, ce non-échange peut donner lieu à un rapport de force mêlant violence verbale et invectives. Nous avons tous eu l’occasion d’assister à ce genre de situation, que ce soit dans la vie courante ou lors de débats diffusés à la radio, à la télévision ou sur Internet.
La maîtrise de l’ego
D’une manière générale, notre aptitude à écouter les autres est fonction de notre capacité à maîtriser notre ego lors d’une discussion. Une telle chose n’est pas aisée, car il est dans sa nature de vouloir s’exprimer, imposer ses idées, convaincre qu’il a raison, attirer l’attention, etc. L’écoute va donc de pair avec l’humilité, vertu qui, précisément, se caractérise par la retenue, la courtoisie et le respect de l’autre. Si vous connaissez parmi vos relations des personnes qui ont éveillé cette vertu, vous aurez certainement noté qu’elles écoutent plus qu’elles ne parlent et ne cherchent pas à monopoliser la parole. Tout en étant ouvertes à la discussion, elles favorisent le dialogue et l’échange.
La voix de notre conscience
En règle générale, les personnes qui savent écouter sont également celles qui prennent régulièrement le temps de s’intérioriser et d’être à l’écoute de leur âme, de leur personnalité profonde, de la voix de leur conscience. Elles ont intégré le fait qu’il faut s’efforcer de parler à bon escient et que le silence est parfois plus évocateur que les mots. Autrement dit, elles appliquent cette maxime connue de tous les Rose-Croix : «Si ce que tu t’apprêtes à dire n’est pas plus beau que le silence, abstiens-toi de parler». Cela suppose d’écouter l’autre avec l’intention de le comprendre et, si l’on prend la parole, de réfléchir préalablement à ce que l’on va dire.
S’intéresser aux autres
Mais l’écoute ne se limite pas à «écouter l’autre» ; elle consiste également à «être à son écoute», c’est-à-dire à lui prêter attention et à s’intéresser à lui. Si faire preuve d’humilité est une vertu, être attentionné l’est tout autant : penser aux autres, se préoccuper de leur bien-être, les aider si besoin est, leur rendre service, sont autant de marques d’intérêt à leur égard et contribuent à rapprocher les individus. À l’inverse, l’indifférence les éloigne les uns des autres et désagrège le tissu social, avec tout ce qui en résulte en termes d’exclusion. Malheureusement, c’est cette tendance qui prédomine dans la société actuelle
Cet article a 11 commentaires
Quand le cœur parle au cœur, le profond au profond, que les mots conduisent au silence pour mieux les faire sien… il n’y a pas de mots pour le dire !
En effet, c’est bien vrai, et certes nous écoutons trop peu et nous sommes guère à l’écoute de l’autre et de nous-mêmes, de notre âme, de la nature, de l’environnement…
L’écoute est bénéfique pour tous et nous enrichit ; elle contribue à la paix, au progrès, à l’harmonie … sur le plan extérieur et sur le plan intérieur.
Cordialement.
Parler est un besoin, écouter est un art. (Goethe)
Pour ceux qui sont attentifs à la moindre lumière d’où qu’elle puisse venir, écouter veut dire apprendre. On peut apprendre beaucoup lorsque nous sommes à l’écoute de notre être intérieur. Cependant les autres peuvent tout aussi bien, par leurs idées et leur comportement, faire naître en nous une compréhension nouvelle en mettant en évidence des points de connaissance qui, nous échappant encore, sont pourtant pour eux déjà très clairs… de là l’importance de l’écoute. Être à l’écoute attentive de l’autre vient aussi mettre en lumière nos forces de même que nos faiblesses personnelles, et cette mise en lumière constitue un des aspects de la connaissance de soi. Et, poursuivant en toute logique, être à l’écoute des autres c’est aussi prendre le temps de lire et de comprendre les écrits rédigés sur ce blog de même que les commentaires intéressants et sincères de ceux qui y participent.
Il est important de savoir faire sa part de silence, pour qu’une conversation soit équilibrée. Ecouter est parfois un art qu’il faut à tout prix maîtriser (…). La meilleure option est de rester honnête vis à vis de l’interlocuteur et lui faire savoir vos limites, car faire semblant d’écouter est assimilable à de l’hypocrisie. On peut ne pas écouter une personne et rester à son écoute… Cependant, le silence que nous nous imposons nous met à notre propre écoute, il permet à notre ‘être intérieur’, notre petite voix intérieure de s’exprimer. De cette façon nous nous écoutons.
Esther Melèdje
Merci pour tous ces enseignements grand Maître. Moi ça me fait beaucoup réfléchir. Merci encore.
Ce qui me vient à l’esprit est ce paradoxe qui remonte à la surface dès que les sujets ‘écoute’ ou ‘silence’ sont abordés. Bien souvent les débats s’animent et chacun a ‘son mot à dire’. Je ne m’exclue pas de ce discours, tout en espérant trouver les mots justes. D’ailleurs, beaucoup de sages nous ont effectivement transmis de nombreuses expressions à ce sujet, depuis bien longtemps et dans toutes les civilisations. Apparemment, cela reste à travers les âges un apprentissage pour chaque être, à devenir cet ‘apprenti-sage’, qui passe du ‘bavardage’, à ‘l‘écoute’, à ‘être à l’écoute’.
Je ne peux que confirmer que l’écoute fait appel à plusieurs vertus ; comme toute aptitude, elle demande d’une part une pratique quotidienne et d’autre part à être dans la présence à tout instant, car les distractions sont nombreuses, intérieures et extérieures à soi. Qui écoute donc vraiment ce que notre interlocuteur veut transmettre comme message ? Qui écoute le message de l’âme ? Ecoutons-nous les mots, le contenu, les émotions, le ressenti qui est entre-les-lignes ? La pratique de la méditation, qui nous amène à entrer en contact avec notre soi intérieur avant tout, avec notre âme, mais aussi avec notre ressenti, notre intuition, nous aide à nous ouvrir à cette dimension. Quand nous trouvons ce calme intérieur, nous arrivons à tout instant à être en contact sur différents plans avec l’être qui nous parle et à capter le message qui est autre que purement ‘verbal’.
Si nous pouvons dire que l’écoute est tout un ‘art’, soyons aussi conscients que l’expression est tout aussi complexe que l’écoute. Disons qu’avoir la communication adéquate en fonction de la situation et des personnes concernées ne coule pas toujours de source. Le récepteur et l’émetteur ne peuvent qu’être vigilants et vérifier la compréhension des messages, sachant que beaucoup de filtres viennent perturber nos perceptions et notre expression.
Parfois, je me dis que quand nous nous appliquons à être à l’écoute de soi, à aller à l’encontre de la complexité de l’humain et de l’univers, de l’écouter, cela nous met face à notre ignorance et à accepter que nous sachions si peux ; cet état nous rend le silence, car les mots ne peuvent décrire ni la beauté de l’univers, ni l’immensité de cet œuvre dont nous faisons partie. Ce n’est qu’après cette prise de conscience, la compréhension de certains aspects de la Vie que petit à petit, nous pouvons écouter les autres et venir en aide, pour finalement reprendre la parole ; une parole qui sera au service de l’autre, de l’humanité, constructive et éclairante. Prenons donc le temps de déposer ce qui nous encombre pour écouter, réfléchir et être disponible pour autrui.
C’est vraiment un beau texte à méditer, car s’il évoque les bienfaits d’une bonne écoute ; il est aussi une invitation à nous comporter envers l’autre comme nous souhaiterions qu’il se comporte envers nous.
Parler est un besoin, écouter un art, c’est accueillir, comprendre, pénétrer au coeur des choses et des gens. Écouter sa voix ne nous empêche pas de nous tromper de chemin. Si nous avons besoin du langage, ce n’est pas seulement pour communiquer du sens, c’est en même temps pour écouter et reconnaître son existence. Celui qui se nourrit du silence de Dieu, finit par comprendre à quelles profondeurs on peut écouter. Entendre ne veut pas dire écouter, car l’ouïe est un sens, mais l’écoute l’art où deux personnes au moins sont nécessaires pour dire une vérité, etc. une pour parler et l’autre pour écouter ; car comme vous le suggérez, l’indifférence est le sommeil de l’âme, une infirmité de l’esprit et du coeur. Cordialement.
« Audi alteram partem ». C’est un principe fondamental de droit qui soumet la justice à l’exigeance d’entendre toutes les parties en conflit avant de rendre son jugement. L’attitude des juges pendant les audiences me semble en raisonnance avec le sujet du jour, l’écoute, car leur apparente passivité durant les débats traduit une grande concentration sur les déclarations des parties et témoins, afin de pouvoir démêler le vrai du faux, notamment lorsque des témoignagnes contradictoires sont rendus. Ainsi, les juges intègrent volontiers dans leur éthique cette maxime: « Si la parole est d’argent, le silence est d’or ».
L’écoute fait partie des vertus fondamentales de l’homme et est une composante de la sagesse.
D’une part, elle transforme souvent autrui en ami et le valorise. D’autre part, elle nous permet de nous enrichir sur tous les plans : connaître plus de choses sur le monde et sur les autres.
Bien sûr, cela est possible à condition d’orienter positivement le sujet qui concerne l’écoute et aussi de pouvoir s’exprimer soi-même, quand il le faut, avec conviction et fermeté.
Cette faculté débouche sur une autre pratique intéressante pour un chercheur de lumière : « l’écoute de soi-même » mais là c’est un autre sujet…