Appel à une religion universelle

« Religion universelle : Religion à vocation œcuménique, c’est-à-dire qui n’est pas destinée à un groupe social déterminé, mais s’adresse à tous les êtres humains, de tous les pays et de tous les temps »

Encyclopaedia Universalis

APPEL À UNE RELIGION UNIVERSELLE

De Serge Toussaint, Grand Maître de l’Ancien et Mystique Ordre de la Rose-Croix

De nos jours, on estime que 80% des êtres humains sont croyants, et qu’environ 65% de ces derniers appartiennent à l’une des grandes religions actuelles : le Judaïsme, le Christianisme, l’Islam, l’Hindouisme, le Bouddhisme, le Taoïsme, etc. Dans l’absolu, toutes ces religions se rattachent au même Dieu, puisqu’elles reconnaissent unanimement qu’Il est unique. Sur ce point, seul diffère le nom qui lui a été attribué par les Anciens : Yahvé, Le Père, Allah, Brahma, Vacuité… Pourtant, la Religion, à l’instar de la Politique, est une cause majeure de discordes, de dissensions, d’oppositions, de conflits et même de guerres. Pourquoi ? Parce qu’elle est fondée sur la croyance et repose sur des dogmes qui souffrent difficilement la contradiction. C’est aussi parce que chaque religion a tendance à prôner l’idée qu’elle détient le monopole de la foi et de la vérité.

« Aucune religion dite révélée ne l’a vraiment été »

Contrairement à ce que l’on dit, aucune religion dite révélée ne l’a vraiment été à l’origine, car chacune d’elles s’est inspirée de celle qui l’a précédée : l’Islam du Christianisme, le Christianisme du Judaïsme, le Judaïsme du monothéisme égyptien, lequel constitue en quelque sorte la source de la Tradition primordiale, dans son aspect exotérique. Ainsi donc, Moïse, Jésus ou Mahomet, pour ne citer qu’eux, n’ont pas eu la révélation soudaine et exclusive de la religion qui leur est attribuée. Disons plutôt qu’ils ont puisé dans un tronc commun et qu’ils ont adapté leur message aux mentalités des peuples auxquels ils s’adressèrent, et ce, à une époque donnée. Par la suite, les clergés qui se sont succédé ont mis en place un système de croyances et de dogmes spécifique à chaque religion, tant sur le plan moral que doctrinal.

À l’aube du XXIe siècle, les religions sont toujours très présentes, même s’il est indéniable qu’elles ont beaucoup perdu de leur influence au cours du temps. Toujours est-il qu’elles demeurent actives et continuent à transmettre leur message. Certes, les athées ont tendance à s’en offusquer, mais c’est un fait. Aussi, plutôt que de les critiquer ou, pire encore, de les combattre, ils devraient voir ce qu’elles offrent de meilleur pour inspirer à leurs fidèles le désir de se comporter comme des hommes et des femmes respectables, soucieux de contribuer positivement au bien commun. En cela, l’athéisme n’est pas un gage d’humanisme et ne véhicule pas nécessairement de belles valeurs, car lui-même peut être sectaire et dogmatique. Cela est encore plus vrai pour le matérialisme, fondé sur la culture de « l’avoir », au détriment de « l’être ».

Si nous voulons que les religions cessent d’être des vecteurs d’intolérance et de conflits entre leurs fidèles, le mieux est de favoriser l’émergence d’une Religion universelle susceptible de répondre à la foi des uns et des autres. J’ai bien conscience que c’est là une entreprise difficile qui exigera beaucoup de temps, tant sont nombreux les obstacles à surmonter. Je pense néanmoins qu’un tel projet est réalisable à long terme, d’autant qu’il s’inscrit dans le sens de l’Histoire. En effet, sous l’effet de la mondialisation, mais aussi du métissage racial, ethnique et culturel, Juifs, Chrétiens, Musulmans, Hindouistes, Bouddhistes et Autres se rencontrent et se côtoient d’un pays à l’autre. Or, ce processus, qui me semble fondamentalement positif, favorise le dialogue entre les religions et la convergence de leur credo respectif.

Un credo commun pour tous les fidèles

Si, comme de nombreux Rosicruciens, j’appelle de mes vœux l’instauration d’une Religion universelle, cela ne veut pas dire pour autant que je vois en elle le summum bonum de la spiritualité et son ultime aboutissement. À mes yeux, l’avènement d’une telle Religion ne marquera qu’une étape dans le cheminement qui doit conduire l’humanité à s’ouvrir graduellement à des idéaux philosophiques et mystiques beaucoup plus élevés que ceux qui sont véhiculés par les religions actuelles. Mais au moins permettra-t-elle à leurs fidèles de s’unir sous l’égide d’un credo commun, étant entendu qu’il faudra que celui-ci soit exempt de tout dogme susceptible d’entretenir l’intolérance, l’intégrisme et le fanatisme.

Peut-être appartenez-vous à l’une des religions existantes, anciennes ou nouvelles ? Dans ce cas, faites preuve de tolérance envers les autres. Soyez un élément d’union entre elles. Si vous faites partie d’un mouvement traditionnel, tel que la Rose-Croix, le Martinisme ou la Franc-Maçonnerie, montrez-vous respectueux à l’égard de tout fidèle sincère et paisible. Sans condescendance, voyez en lui une âme qui, un jour ou l’autre, ne se contentera plus de suivre une voie de croyance, mais, comme vous, aspirera à la Connaissance. Enfin, si vous êtes agnostique ou athée, dites-vous qu’une Religion universelle sera nécessairement un vecteur de paix et de fraternité, et qu’elle sera donc bénéfique à tous, d’autant que rien ne vous obligera à y adhérer.

Si, comme de nombreux membres de l’A.M.O.R.C., j’en appelle à l’instauration d’une Religion universelle, cette idée n’est pas nouvelle. En effet, Coménius, célèbre Rose-Croix du XVIIe siècle, considéré comme le père spirituel de l’U.N.E.S.C.O., la souhaitait déjà. C’est ainsi qu’on peut lire dans son ouvrage intitulé « La Consultation universelle » : « Que toutes les philosophies n’en fassent plus qu’une… Que toutes les religions n’en fassent plus qu’une… Que tous les gouvernements n’en fassent plus qu’un… La Réforme définitive rassemblera tous les hommes dans l’universalité […] Quand nous aurons institué une philosophie, une religion et une politique universelles, le Bien universel nous apportera la satisfaction de tous les désirs humains. »

L’Ordre de la Rose-Croix n’est pas une religion

Bien que l’Ordre de la Rose-Croix ne soit pas une religion, il compte parmi ses membres des fidèles de toutes les religions actuelles, mais aussi, et de plus en plus, des hommes et des femmes qui n’en suivent aucune, notamment parmi les jeunes. C’est bien la preuve qu’il est possible de faire abstraction des dogmes auxquels on adhère ou on a adhéré, et de privilégier, sinon des connaissances, du moins des croyances communes. Mieux encore, cela prouve que la spiritualité transcende la religiosité, en ce sens que l’on peut admettre l’existence de Dieu et de l’âme sans pour autant adhérer à une religion. En fait, tel est le cas de la grande majorité des Rosicruciens, dont la quête est fondamentalement philosophique, en ce sens qu’ils mènent une quête de sagesse.

En conclusion, je vous invite à favoriser l’émergence d’une Religion universelle, ou au moins à ne pas vous y opposer. Ce faisant, vous montrerez aux responsables religieux et aux observateurs qui en prendront connaissance qu’il s’agit d’un projet et d’une perspective qui répondent au souhait d’un nombre croissant de croyants, d’agnostiques et de athées, et qu’il mérite par conséquent toute leur attention. Par ailleurs, si vous le voulez bien, vous pouvez prendre vis-à-vis de vous-même l’engagement suivant : « Souhaitant que les religions cessent d’être des vecteurs d’intolérance et de conflits entre leurs fidèles, je soutiens l’idée de voir émerger un jour une Religion universelle non dogmatique, ouverte à tous les croyants, sans aucune distinction ».

Dans les liens de l’universalité.

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